A l’occasion de la sortie du film en DVD le 26 Mai prochain, voici un entretien avec Pablo Rosso, directeur de la photographie de REc 2. Si le duo Jaume Balaguero-Paco Plaza est au cœur du processus de création de la saga [REC], il ne faut pas oublier le troisième larron de la bande, celui qui a beaucoup œuvré pour donner à la série ce look si singulier : Pablo Rosso, le directeur de la photo des deux films.
Au regard du succès considérable du premier [REC] et en tenant compte du challenge visuel proposé par le film, comment avez-vous abordé cette suite ? N’aviez-vous pas peur de refaire le même film, en se contentant de le rendre juste un peu plus spectaculaire ?
[REC] fut une expérience libre. Le “language” se développa au fur et à mesure qu’on tournait. Le public ne savait pas très bien ce qu’il allait voir. Ce fut une expérience assez novatrice pour le public et pour nous également. [REC]2 commence totalement à l’opposé : le public qui va voir la suite, sait clairement à quoi s’attendre (même si chacun attend quelque chose de différent…). Dans cette suite, on ne pouvait pas tromper le spectateur et abandonner “l’esprit [REC]”, mais on ne pouvait pas non plus faire la même chose. Je pense que l’on a atteint un équilibre entre l’esprit de [REC] et la volonté d’innover.
Le premier film était déjà un tour de force technique avec ce concept d’une seule caméra comme unique point de vue de l’histoire. Mais cette fois-ci, vous multipliez tout par 4. Vous aimez la difficulté ?
Cela n’a pas vraiment présenté de grande difficulté. Les différentes caméras utilisées ont leurs vertus et leurs défauts et on essaie d’en profiter. Le plus difficile fut sans aucun doute la maîtrise de l’éclairage du bâtiment. Selon si le faisceau lumineux était coupé ou pas, et au moment de tourner en extérieur, non pas en studio, avec des caméras grand angle, il était quasi impossible de cacher les appareils d’éclairage. C’est ce qui a déterminé en grande partie le look du film : la lumière vient de dehors ou est sur les acteurs. Ils ont du apprendre, en plus de leur texte et des scènes d’actions, les chorégraphies avec l’éclairage et assimiler parfaitement des directives précises et techniques, comme par exemple un « éclaire le visage d’un tel, et après baisse le bras afin que l’éclairage que tu as sur toi illumine le visage de la fille ». Il fallait que tout ceci soit instinctif pour eux, pour rendre l’action réaliste et fluide.
Comment avez-vous défini les styles visuels de chaque film ?
Pour les deux films, la consigne de base était la même : il fallait que ce soit crédible, authentique. A partir de là, les conditions de la lumière dans le 1 (un bâtiment habité par des personnes dans une nuit classique) et dans le 2 (un bâtiment avec la lumière coupée et habité par des zombies) ont fait le reste. Tout dépendait aussi de qui avait la caméra et comment il la portait. Dans le premier film, c’est un journaliste avec une caméra à la main. Dans le 2, c’est soit un flic, caméra à l’épaule – subtile mais différence perceptible -, soit un flic avec une mini caméra fixée à un casque. Et il y avait encore une possibilité visuelle différente avec les séquences des jeunes ados avec leur caméra vidéo traditionnelle à la main.
Quelles furent les différences entre les deux tournages ?
Je pense que la grande différence a été la pression. Pour le premier, on était libre et on faisait les choses à notre manière. Pour le deuxième, on savait qu’il y avait une grande attente de la part des spectateurs. On était donc tous hyper impliqués pour ne pas les décevoir.
Comment avez-vous géré les performances techniques d’un tournage avec plusieurs caméras de types différents sur le plateau ?
Cela n’a pas été difficile, chaque plan a été tourné avec la caméra correspondante. L’incorporation des mini-caméras dans les casques supposait un défi technique. Car avoir un tel grand angle impose de cacher l’éclairage. On a fait également le choix de prendre les rushes qui avaient la qualité technique la moins bonne afin de pouvoir obtenir au mieux la texture pas très nette, caractéristique du look du film.
Que pensez-vous de l’évolution technologique qui permet à tout le monde de faire désormais un film ?
C’est vrai. Encore une fois, c’est l’idée qui l’emporte. Avant, c’était plus dur de faire un film. De nos jours, c’est plus facile d’un point de vue technique, on a tous une caméra à portée de main sans le savoir. Avec Jaume, on a fait un court-métrage avec un téléphone portable. De toute façon, faire un film, c’est facile actuellement, mais faire un bon film, c’est toujours aussi dur qu’auparavant.