Après la mort de Nina dans un accident de voiture, Rob a bien du mal à surmonter son chagrin. Mais alors qu’il entame une nouvelle relation avec Holly, la défunte prend un malin plaisir à venir hanter le jeune couple à chaque fois qu’ils font l’amour.
Après de nombreux sketches pour la BBC et une dizaine de courts salués, les frères Chris et Ben Blaine passent aux choses sérieuses. Sélectionné en compétition internationale à l’Etrange Festival, le premier opus des frères Blaine est un drame macabre original à l’humour pince sans rire. Les réalisateurs nous donnent à voir une œuvre moderne romantique dans le vrai sens du terme : façon 19ème siècle revisité, à l’anglaise ! Le nocturne et ambitieux Nina forever dépoussière magnifiquement le genre. Les réalisateurs, par le biais du mythe de l’amour éternel, racontent un couple actuel qui tente d’affronter et de résoudre ses problèmes. Le mélange des genres est particulièrement heureux ici grâce à une écriture de grande qualité qui joue de façon maîtrisée avec des codes littéraires et cinématographiques parfaitement digérés.
Nina forever est donc une histoire, d’amour éternel et de fantôme certes (qui rappelle le mythe de Nosferatu), mais pragmatique ! L’apparition de Nina, la première fois que le couple fait l’amour, est presque immédiatement acceptée et intégrée par les protagonistes. Rob et Holly ne sont pas plus étonnés que ça, leur problème est surtout de réussir à vivre avec, alors ils s’organisent. Ce qui n’est pas simple, surtout que ce fantôme est un être de chair et de sang qui laisse des traces plutôt très visibles sur la literie… La photographie, qui exploite merveilleusement bien ce rouge sang et sublime le corps fracassé d’une Nina accidentée, participe grandement au trouble du spectateur. S’il s’agit d’une évidente métaphore du deuil et de la place d’un ex défunt dans une nouvelle relation amoureuse, le film a aussi – et surtout – une dimension fantastique très actuelle.
C’est un couple contemporain qui nous est intelligemment donné à voir. ici, les personnages féminins, consistants, initient les choses. Le mâle, à côté de ses pompes et passif, suit presque bêtement le mouvement. C’est Holly, qui fait du « rentre dedans », au départ, à un Rob très fragile. Et il est de fait question de « plan à trois », puisque Holly, encore elle, invite Nina à participer à ses ébats avec son homme et souhaite même “lui faire plaisir”… En fin de compte, le véritable couple semble être celui formé par Holly et Nina. Ne s’agit-il pas plus d’une histoire d’amour entre femmes, dont l’homme serait exclu ? Le traitement du personnage masculin et la fin du film tendent à prouver que oui.
Quelle que soit l’interprétation qu’on en fasse, il est ici question de chair fraîche et de chair morte, de vie nocturne et diurne, de désir charnel empreint de spiritualité, connecté à l’au-delà. De chair et de marque indélébile, évoquée à de nombreuses reprises. Sans démonstrations visuelles inutiles. La remarquable amplitude de la mise en scène et la belle photographie nocturne intègrent subtilement tous les éléments d’un romantisme morbide contemporain dans la narration. Les respirations qu’offre la construction et le montage permettent au spectateur de s’imprégner de cette ambiance troublante parfois à la limite du gothique, comme cette scène de nuit sublime, évidemment… dans un cimetière.
Nina forever est à voir, absolument.
Critique par Marie T.
A sortir d’urgence de la catégorie incontournable car extrêmement contournable… Branlette intellectuelle….