[Critique] Dexter – Saison 3

Après une saison 2 très aboutie et riche en rebondissements aussi bien dans sa “carrière” de criminel que dans sa vie personnelle, Dexter, notre anti-héros préféré revient avec une troisième saison qui promet. Après s’être débarrassé du Ice Truck Killer (son frère) dans la saison 1, puis avoir échappé à l’entêtement du sergent Doakes et aux griffes de la possessive Leila dans la saison 2, Dexter Morgan sait désormais qu’il ne doit pas se fier à n’importe qui. Entre conflits surmoïques et remises en questions, il faut un peu de temps pour se forger un nouveau pedigree de tueur en série. D’ailleurs, le Code, testament de son père Harry, va être mis à mal volontairement et involontairement durant ces douze épisodes. Sans délaisser complètement son côté obscur, il s’applique à façonner son côté clair : Dex’ s’improvise comme le parfait compagnon pour Rita et s’apprivoise à l’idée de devenir le beau-père de ses enfants.

Cette saison 3 est certainement celle qui a été la plus décriée par les fans et par le public, certains la disent décevante, centrée sur elle même et d’autres étaient même inquiets de l’avenir de la série. Il est vrai qu’on peut tout à fait aller dans ce sens : on retrouve ici une intrigue peu originale, très peu de rebondissements et on s’attend un peu à la tournure des évènements quand on connait un peu la série.

Dès le début de la saison, Dexter a affaire à quelques complications alors qu’il pensait que la vie commençait à être clémente avec lui : d’abord, lors d’une de ses traques nocturnes de routine, Dexter tue accidentellement un homme innocent, qui s’avère être de surcroît le frère d’un homme de pouvoir, le procureur Miguel Prado. Cette entorse au code va le déranger sur le moment, mais il va vite chercher à prouver que sa victime n’était pas si innocente que cela, en réalité, c’était un trafiquant de drogue. Mais, chose curieuse, cette erreur ne va pas le poursuivre plus loin que cela. Amené par un concours de circonstances à découvrir l’impressionnant secret de Dexter, mais ignorant qu’il est à l’origine de la mort de son frère, Mi­guel semble entrevoir en notre protagoniste un sauveur de l’humanité et une réponse aux injustices qu’il rencontre tous les jours.
Au fur et à mesure des épisodes, Dexter tisse un lien d’amitié à la fois nouveau pour lui, et apparemment fort avec Miguel. Cet homme très puissant  semble fasciner notre héros au début, ne croyant pas que quelqu’un de ce genre puisse s’intéresser à lui, et encore moins le comprendre. Le personnage de Prado, incarné avec une grande nuance par Jimmy Smits offre une interprétation complexe avec un caractère parfois sympathique et parfois froid et effrayant. Par son métier, il symbolise à la perfection la “justice” que Dexter incarne à sa manière mais également ce masque dont il parle si souvent et que Prado, en tant que procureur apparemment au delà de tous soupçons, incarne parfaitement. La saison entière est centrée sur cette relation particulière entre admiration et méfiance, entre amitié et instinct de conservation. Ce nouveau compagnon de route va progressivement devenir son alter-ego dans le crime, mais tout ne va pas se passer comme prévu puisque Miguel, une fois initié par Dexter, va vouloir “voler” de ses propres ailes et tuer selon son propre code dévoilant ainsi qu’il a finalement manipulé celui qui croyait être son ami en lui dévoilant ” sa noirceur”. Et cela se termine comme vous le devinez tous. Décidemment assez naîf Dexter !

Lors de ces épisodes, on éprouve sensiblement comme une impression de déjà-vu, et c’est sans doute le plus regrettable. Car le décorticage du lien d’amitié tout neuf entre Dex­ter et Miguel, avec son lot de risques et de questionnements sur l’insensibilité et l’anormalité du “justicier solitaire”, renvoie au lien qui a uni Dexter et Lila dans la saison 2 : il semblerait que les interrogations sur la confiance, sur le désir de solitude, le déception et sur le fardeau soient les mêmes.

L’autre fil directeur de la saison, et plus intéressant avouons-le, c’est le thème de la paternité qui souligne la totalité des épisodes. Non seulement car Dexter apprend qu’il va être père à la conclusion d’un épisode où Rita apparait de plus en plus agaçante et ” la petite maison dans la prairie” mais que voulez-vous, c’est son rôle qui exige ça. On en découvre un peu plus sur la jeune femme notamment une superbe idée d’un secret qu’elle aurait jusqu’a présent caché : elle aurait été mariée une première fois à l’âge de 16 ans. Cette idée n’aura pas de suite même pas dans la saison 4, les scénaristes préférant laisser à Rita ce rôle de blonde un peu inutile.

Ainsi, ses questionnements sur sa légitimité de cet enfant à naître, sur les choses qu’il aurait à apporter à un enfant vont l’amener à se tourner vers les relations qu’il a eues avec son propre père. Le fantôme de Harry est toujours présent pour épauler son fils malgré que celui-ci lui ait tourné le dos après qu’il ait découvert que son père n’était pas l’homme parfait qu’il s’imaginait. Le père (et la conscience) de Dexter, garde sa place de choix, et lui remet en mémoire les dangers qu’il encourt à vouloir ainsi partager son secret avec Prado. D’ailleurs, le code Harry tout entier est chamboulé dans la tête de Dexter : celui-ci se pose désormais davantage la question de la légitimité de la mort, ainsi que celle de l’héritage et du poids de la responsabilité filiale.

Les personnages secondaires ont peu d’importance dans cette saison mais leurs histoires respectives sont souvent amenées de façons peu fine : Debra Morgan, la soeur de Dexter a toujours des problèmes de coeur et un goût toujours aussi peu inspiré en matière de mecs, si bien que ça lui apporte toujours autant d’ ennuis. Domage car son personnage très interessant mérite un peu mieux que ces histoires digne des Feux de l’Amour. C’est à la fin de la saison 3  qu’elle va se décider à fouiller dans le passé de son père après que Dexter lui ait avoué que celui-ci n’était pas tout blanc et qu’il avait, lui aussi, eu des relations avec des indics ( comme elle ). Elle va donc potentiellement découvrir l’identité de la vraie mère de Dexter ( saison 4 ). Quand au reste de l’équipe, Batista fait enfin connaissance avec une vraie relation saine et prend du gallon, Masuka a une crise existentielle que j’avoue ne pas avoir saisi, Quinn ( un nouveau venu ) fait équipe avec Deb’. Rien de bien transcendant. C’est l’histoire de Laguerta qui a retenu toute mon attention tant l’amitié qui la lie a Elen Wolf ( tuée par Miguel à cause d’une mésentente entre eux ) est bien rendue, pleine de finesse et touchante.

En bref, une saison 3 en dessous des autres à cause du côté répétitif de certains épisodes et à la Happy End trop difficile à avaler pour des fans habitués à des jours plus sombres pour notre ami Dexter. Mais pour cela, il faudra attendre la saison 4.