[Etrange Festival 2012 – Evènement] Nuit Zombie

Le “must-be-there” event du mois de septembre, pour tous les amateurs de chair putréfiée et d’organes divers exposés au grand jour, était sans conteste la nuit Zombie organisée par l’Étrange Festival. Du moins à priori. Car au petit matin, hypoglycémie et déficit de sommeil aidant, la déception était de taille. Trois semaines après les hostilités, ragaillardi tant par un coma bienfaiteur que par la consommation sans limite de boyaux fumants et autre jus de pancréas éclaté, revenons avec le recul nécessaire sur les quatre longs-métrages qui furent offerts en pâture à une audience de psychotiques prêts à démembrer sans sourciller les programmateurs au moindre écart de qualité…

Pour démarrer les hostilités, rien de mieux que de proposer à un public en grande forme (comprendre : hystérique) la dernière production Sushi Typhoon, société spécialisée dans les bluettes poétiques et déjà responsable des monuments de subtilité que sont Tokyo Gore Police ou encore Robo-Geisha. Zombie Ass : Toilet of the Dead, donc, ne fait pas vraiment dans la dentelle, même s’il n’hésite jamais à délivrer son quota de petites culottes blanches. Objectif revendiqué ? Montrer un maximum de lingerie avant de dévoiler sous toutes les coutures d’appétissants fessiers charnus desquels sortiront très vite moult fluides organiques et autres vers peu ragoutants. Et qui de mieux pour assurer le spectacle que Noburo Iguchi, ancien réalisateur de pornos, dont certains à tendance scatologique ? Habitué de l’image extrême et des projets à petits budget, le bonhomme récidive ici dans ses obsessions maladives et livre une comédie d’horreur aussi branque que jubilatoire, ancrant son récit dans la satire sociale (la bombasse de rigueur entraîne ses amis dans un bois abritant des vers solitaires voraces qui lui permettront, une fois ingérés, d’être encore plus belle, car incroyablement mince -sic-) pour déraper totalement dans le comique de situation graveleux. Érotisme perverti par la matière fécale, empathie anéantie par le jeu outré d’acteurs terriblement mauvais dont les incroyables pétages de plomb transcendent la médiocrité, rien ne se tient mais tout fonctionne à merveille, dans le pur esprit de la mythique Troma. Malgré un aspect répétitif, l’ennui est évité par l’emphase mise sur les ruptures de ton, aussi nombreuses que diverses, faisant passer Zombie Ass du survival zombiesque au film de baston, de l’agression animale au super-sentai, avec une sympathique insolence. Un aspect brainless assumé qui passe au moins aussi bien qu’une bonne diarrhée des familles ! En gros, c’est de la merde mais ça soulage.

Sympathique zombie-movie anglais prenant pour cadre la banlieue Est de Londres, Cockneys vs Zombies nous montre son quota de petits vieux isolés dans une maison de retraite aux prises avec des morts-vivants voraces. Un détournement amusant de La Nuit des Morts-vivants qui permet au réalisateur Matthias Hoene d’aborder son film sous l’angle de la parabole. Satire évidente d’une déchéance sociale typiquement occidentale, incitant les jeunes générations à délaisser les plus anciennes pour leur propre intérêt économico-politique, Cockneys… traite de l’abandon des personnes âgées, laissées pour compte dans un monde en crise au système oppressant. A la manière d’un George Romero post-moderne (en tout de même moins inspiré), Matt Hoene exploite donc un genre galvaudé (franchement, on en a un peu marre des zombies au cinéma, non ? Mais alors, que fait-on là ? Oui, vous avez raison de poser la question !) pour mieux exposer une problématique contemporaine qui l’interpelle et l’inquiète. Seul défaut véritablement handicapant, le metteur en scène se frotte de trop près au mythique Shaun of the Dead sans jamais être en mesure de soutenir la comparaison. Ainsi, la comédie gaguesque n’est pas l’élément qui fonctionne le mieux ici et on préfèrera de très loin voir les sous-arcs narratifs se rejoindre pour formuler une solution optimiste et très satisfaisante que constater l’extrême banalité d’un humour tournant trop souvent à vide (exception faite d’une déjà culte course-poursuite entre un mort-vivant sous Lexomil et un petit vieux en déambulateur). Gageons que Cockneys vs Zombies aurait gagné en puissance s’il n’avait pas cédé à la mode du slapstick pour s’orienter sur des chemins plus matures et, de nos jours, bien moins pratiqués.

Hasard de l’actualité zombiesque ou roublardise éhontée des programmateurs du festival, Gangsters, Guns and Zombies nous proposait grossièrement le même pitch que Cockneys vs Zombies, mais cette fois-ci réalisé sans argent. Après une présentation ronflante des personnages effectuée à l’économie, c’est-à-dire à base d’arrêts sur image et de voix-off faussement cool tentant la description objective sans jamais parvenir à susciter un soupçon d’intérêt, l’intrigue se met en branle pour un résultat d’une longueur à mourir. Rappelons qu’il s’agissait là du troisième film de la soirée dont la projection débutait vers les 4 heures du matin bien tapées ! Entre tentative d’esthétique lourdingue à la Guy Ritchie et rythme narratif aussi peu stable que les murs de ses décors en carton, on trouve – heureusement – une interprétation plutôt bonne d’acteurs semblant se sentir concernés et pas mal d’idées comiques. Moment d’hilarité générale, un bébé zombie utilisé comme un ballon de rugby. Ça rime et c’est toujours amusant. Malheureusement, le réalisateur passe en pilote automatique dès la fin du premier tiers de son récit et les quelques idées originales sont enterrées au profit de dialogues interminables et d’un rythme à la lenteur exaspérante, tant il ne sert aucune matière scénaristique ni aucun propos. Un film sans imagination qui, on peut en être certain, eut raison de la majorité du public tant on entendait les mouches voler. Peut-être y’avait-il d’ailleurs quelques cadavres dans la salle ?

Alors là, sortez la djellaba, chargez votre AK-47 et joignez-vous à nous pour exterminer les responsables de cette insupportable purge ! Plagiat honteux du génial court-métrage français Zombinladen (présenté comme un teaser et montrant l’invasion de Belle-Île en Mer par une horde de djihadistes zombifiés guidés par un Ben Laden en état de putréfaction avancée), Osombie recycle son pitch pour un résultat absolument désastreux. Moqué en ouverture par un Rurik Sallé aussi parti-pris (il a joué dans le court originel) que guidé par la voix de la raison, il s’agit certainement du pire film de zombies produit de mémoire récente. Succession de dialogues insipides à base du devoir du soldat en temps de guerre, de grandeur de la nation et de traumas personnels ridicules, le tout entrecoupé de quelques gunfights destiné à contenter les amateurs de gore peu exigeants (les  morts-vivants ne sont ici que des cibles à peine mouvantes n’apportant aucune plus-value), Osombie n’exploite jamais le potentiel politico-comique de son sujet et échoue lamentablement sur tous les fronts. A 7 heures du matin, à l’image de nombreux autres spectateurs moribonds (finalement, les vrais morts-vivants étaient dans la salle !), je décidai de m’éclipser avant la fin, éreinté par une journée marathon de 7 films, sans même prendre la peine d’éventrer l’ouvreuse enceinte et de consommer son foetus en commençant par le cordon ombilical, blasé que j’étais par tant d’indigences aussi insupportables que frelatées.

Une nuit bien décevante, donc ! Heureusement, la programmation des jours suivants avait du potentiel à revendre et le festival se racheta en de multiples occasions. On en reparle prochainement.

Article par Nicolas Dehais