Bruno aime son épouse Maxine. Mais son amour, tout comme son apparence physique, commencent lentement à se transformer… Et Bruno reste impuissant face à ce quelque chose qu’il sent bouillir en lui. Car il n’est plus possible de faire demi-tour lorsqu’on explore le côté sombre de l’amour pour n’y trouver que pouvoir, haine et violence.
L’amour qui peut vous rendre fou, la possessivité et l’aliénation dans la relation à l’autre sont des thèmes qu’on retrouve fréquemment dans le cinéma fantastique. C’est peut être à cause de la mise à mal psychique et physique que produit l’état amoureux dans ses aspects les plus noirs. Et c’est tout à fait ce qui transparaît dans ce Beast : une histoire complexe et sombre de deux individus qui ne savent plus s’aimer et où la destruction a pris la place de l’affection.
Plutôt que de se contenter d’une simple trame dramatique, Christoffer Boe y insère une tonalité corporelle saisissante en cherchant à comprendre les conséquences physiques de la souffrance amoureuse. Grâce à une métaphore sublime de l’enfant à naitre, synonyme de maladie infectieuse pour le héros, le réalisateur nous laisse entrevoir les effets d’une passion dévorante où se mêlent amour et haine.
Car dans cet amour démesuré que Bruno éprouve pour sa compagne, il y a aussi ce désir insatiable de la posséder entièrement, son corps et ses organes inclus. Ce tableau de la perversion dessiné par Christoffer Boe nous montre parfaitement comment le personnage principal se replie peu à peu sur lui-même et sur ses fantasmes mais crie pourtant à sa femme son amour sans condition. Mais il s’agit d’un amour purement narcissique où la femme ne sert qu’à satisfaire ses sombres envies et dans lequel il demande toujours plus.
Elle, accepte par amour ou par manque de courage, de devenir le fétiche de son homme de peur de le quitter. Ce personnage féminin, tout en contradictions est partagée entre la peur et la nostalgie de l’amour perdu. Le réalisateur va travailler sur cette dynamique de détachement insupportable mais pourtant inévitable pour nous montrer comment l’incompréhension prend le pas sur le reste.
Formellement, le métrage est léché et froid, presque monochrome ce qui tranche avec les quelques scènes « organiques » parsemées ça et là. Les comédiens sont tous brillants à commencer par Marijana Jankovic qui joue parfaitement l’ambiguîté et s’en sort avec les honneurs en campant le rôle difficile d’une femme adultère qui a forcément le mauvais rôle.
Anatomique et passionnel, Beast est un beau cri d’amour primaire, intelligent et désespéré dont la conclusion poétique redonne un peu de baume au cœur.