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[Interview] Eli Roth, réalisateur de Green Inferno #2

On voit peu de films de cannibales au final. Est-ce que vous pensez que Green Inferno va rendre ce genre populaire de nouveau ?

Eli Roth : Je l’espère ! Mais plus que ça, j’espère surtout que ça donnera envie aux gens de revoir des vieux classiques. J’en ai cité plusieurs dans le générique de fin pour ça. « Massacre in dinosaur valley » par exemple. A l’époque forcément, avec un titre pareil, je pensais que c’était un film avec des dinosaures, pas des cannibales ! Ces films étaient obligés d’avoir des titres comme ça pour ne pas rebuter le public, il y en a des tas et beaucoup sont excellents, et à découvrir ou redécouvrir. C’est un sous-genre très fun, qui prenait des risques lui aussi. Vous savez on a entendu tellement de légendes sur le tournage qu’on a de la matière pour faire Beyond the Green Inferno, Escape the Green Inferno, Hell of the Green inferno, etc (rires).

Mais ce que je préfère dans Green Inferno, c’est que ce n’est pas qu’un film de cannibale. C’est un beau film aussi, visuellement parlant. La jungle est superbe, ces couleurs…ce n’est pas un énième film d’horreur dans une maison miteuse au décor déjà vu ! Là on dirait un film d’aventure, un peu un film d’horreur déguisé. Ça peut permettre d’attirer un autre public aussi. Je veux qu’ils découvrent ce genre comme ça et se disent « Ok, si c’est ça un film d’horreur, j’aime bien et ça me donne envie de voir ceux dont il s’inspire ».

Vous parvenez toujours à mixer horreur et humour aussi…

Eli Roth : Oui. Un film doit être fun ! C’est comme ma scène avec la diarrhée dans Green Inferno. Quand je l’ai écrite, tout le monde m’a dit « Pourquoi tu fais ça ?! ». Mais arrêtons 2 secondes. Dans TOUS les films que je regarde, si des gens sont coincés longtemps quelque part, le seul truc auquel je pense c’est « Que se passe-t-il si quelqu’un doit aller aux toilettes ?». Car ça va forcément arriver ! Et on ne le montre jamais.  Et si je n’ai pas cette réponse, je ne profite pas pleinement du film que je regarde. Du coup je préfère le montrer, puis c’est la vérité. Tout le monde a été malade en vrai sur le tournage en plus. En fait, je veux que mes films soient comme des montagnes russes : ça secoue, ça peut rendre malade, mais qu’est-ce que c’est fun !

 

La scène du crash d’avion est impressionnante, comment l’avez-vous tournée ?

Eli Roth : Je voulais au maximum que ça semble réel, et ne pas utiliser d’effets spéciaux. On a fait construire un tambour géant et on y a reconstitué un avion qu’on a fait tourner à 360° avec les acteurs dedans. Il y avait une caméra fixe à l’extérieur de l’avion et il y en avait une à l’intérieur aussi qui bougeait avec eux. On a suspendu l’avion à 10m du sol, c’était super risqué. Je me suis rendu compte après avoir fini la scène qu’un tronc d’arbre aurait pu tuer quelqu’un s’il était passé un tout petit peu trop à gauche. Mais le résultat est parfait, le rendu est génial. Les acteurs ont détesté ça forcément, mais c’était fun !

 

[Spoiler] Pourquoi cette fin à Green Inferno ? [Spoiler]

Eli Roth : Je me suis demandé quelles étaient les vraies intentions de mon personnage principal. C’est la seule à ne pas faire la fête à la fin. Réfléchissons : si elle voulait vraiment sauver la tribu, elle ne parlerait pas de ce qui s’est passé. Si elle disait que ce sont des sauvages, on ferait tout pour s’en débarrasser. Alors que si elle dit qu’ils sont gentils, l’opinion publique fera tout pour les préserver et les laisser en paix. Et je pense qu’elle veut les protéger. À cause de cette petite fille avec la grippe, elle ne veut pas qu’elle meurt, donc elle fait ce qu’il faut. De toute façon…ce qui est fait est fait ! [Fin du spoiler ]

Lors de la projection publique du film hier soir, vous faisiez allusion à la censure. Ça vous semble important que ce genre de films se voit sur grand écran ?

Eli Roth : C’est le problème d’être un outsider. Ce n’est pas à vous de dire ce qu’il se passe de bien ou non dans d’autres cultures. Je sais que les fans ici aiment ce genre de films, mais d’autres facteurs m’échappent. Ce n’est pas un hasard si ces films ne passent pas au ciné. On nous raconte que si on passe un film violent au ciné, les gens vont devenir violents… Je ne sais pas si c’est vrai et je ne sais pas pourquoi on pense ça surtout. Il y a sûrement des facteurs extérieurs qui déclenchent ça, mais quoi qu’il en soit aujourd’hui, les propriétaires de cinémas pensent que si vous diffusez un film d’horreur, une horde de hooligans va surgir et tout détruire…

C’est fou. Je pense que les gens aimeraient voir Green Inferno sur grand écran. Je trouve ça triste qu’une personne empêche un pays entier de voir un film par exemple. Je pense aussi que c’est aux fans, au public, aux journalistes et aux critiques de faire entendre leurs voix et dire « Hey, on aime ces films, laissez-nous les voir sur grand écran. Et on vous emmerde vous et vos chaînes de cinémas de merde qui censurent l’art ! ».

Je me sens mal pour ces fans car c’est eux qui sont punis dans l’histoire. Peut-être que si chacun d’entre eux envoyait un mail au directeur du ciné qui refuse de passer Green Inferno pour dire « Moi j’irai voir le film, je paierai ma place pour le voir sur grand écran » ça marcherait…Car la violence n’a rien à voir là-dedans, ce sont des conneries j’en suis sûr, c’est juste politique. Dénonçons ces hypocrites, pointons-les du doigt ! En attendant, je suis triste pour les fans français qui ne peuvent pas voir les films qu’ils aiment sur grand écran.

Du coup, Green Inferno 2… possible ou pas ?

Eli Roth : Le scénario est déjà prêt…ça ne dépend plus que du public et de leur soutien envers le film ! Si des gens paient pour voir Green Inferno, il est plus facile pour moi de demander un budget pour tourner le 2ème. J’aurais leur confiance. Mais si personne ne va le voir… J’ai fait le 1er film avec 5 millions de dollars. Je peux faire pareil pour le 2ème !

 

En tant que fan de films d’horreur, comment avez-vous réagi à la mort de Wes Craven ?

Eli Roth : J’étais très triste. J’ai utilisé 5 chansons de « La dernière maison sur la gauche » dans Cabin Fever à l’époque, je lui avais demandé les autorisations. Wes ne pouvait pas être plus gentil, il m’a toujours soutenu. Il fait partie de ces gens que tu regardes et où tu te dis « Je veux être comme lui ». Il était adorable, il méditait beaucoup, c’était un vrai gentleman avec tout le monde. Je ne savais même pas qu’il était malade, il était discret. Ce fut un choc…

C’est ainsi que s’achèvera cette table ronde. Merci à Wild Side et Way to blue de l’avoir organisée et aux collègues de La bobine sélective, Daily Mars, Clap Mag, Mondociné et Ciné-Nerd d’avoir aussi posé leurs questions durant cette interview !

Notre critique du film

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