Que celui qui n’a jamais sursauté pendant un film d’horreur lève la main ! Tout le monde a forcément été victime de ce qu’on appelle le “jump scare” (traduisible par “sauter de peur”), procédé qui vise à créer la surprise dans un moment de tension. Si certains spectateurs y voient là une symbiose de la frayeur, pour d’autres c’est devenu la solution de facilité et une des ficelles les plus surexploitées du genre.
D’après C. Robert Cargill, le scénariste de Sinister, “un bon jump scare est un tour de magie”. Le premier remonterait au début des années 40 au sein du film Cat People (La Féline) réalisé par Jacques Tourneur. Alice, qui traverse seule Central Park en pleine nuit, se sent poursuivie et accélère le pas. Alors que la tension est à son comble, un bus rentre soudain dans le champ et provoque la surprise. Il est à noter que cette astuce s’appellera dans un premier temps “l’effet bus” ou le “Lewton bus” en anglais, en référence au producteur du film Val Lewton surnommé le “Sultan des Frissons”.
En 1959, William Castle va un peu plus loin : lors de la projection de son film Le Désosseur de cadavres, il règle les sièges du cinéma où le film est projeté afin qu’ils vibrent aux moments clés ! Sensations garanties pour les spectateurs !
Le jump scare se caractérise donc par un changement inattendu et brutal dans l’image, souvent accompagné d’une musique stridente ou d’un effet sonore relativement fort. Le coup du chat qui surgit lors d’une séquence à suspense est connu de tous et a été maintes fois utilisé : Vendredi 13 – Chapitre 2 : le tueur du vendredi (Steve Miner, 1981), Simetierre (Mary Lambert, 1989) ou encore Alien, le huitième passager (Ridley Scott, 1979).
Mais, hormis l’apparition brusque dans le champ, le procédé peut aussi fonctionner avec un élément déjà présent dans le cadre, comme en témoigne une des séquences de Mamá (Andrés Muschietti, 2013) dans laquelle le fantôme, immobile dans une pièce, fonce tout d’un coup en direction de la petite fille.
Le slasher est une branche du cinéma d’horreur qui est friande du jump scare, en particulier celui du “Killer Returns”. Le premier Vendredi 13 réalisé par Sean S. Cunningham en 1980 en est un des meilleurs exemples : à la fin du film, alors que la rescapée des meurtres commis au camp de vacances est enfin saine et sauve, Jason jaillit du lac pour l’emporter. Une séquence surprenante qui n’est pas sans rappeler celle qui clôture Carrie de Brian De Palma (1976) où la main soudain sortie d’une tombe venait définitivement secouer le coeur du spectateur.
Wes Craven, habitué à manier les mécanismes du film d’horreur, viendra jongler avec les codes dans Scream (1996) qui relance la mode des slashers et ouvre ainsi la voie à des ersatz de plus ou moins bonne qualité… Souviens-toi… l’été dernier (Jim Gillespie, 1997), Urban Legend (Jamie Blanks, 1998) et Halloween 20 ans après (Steve Miner, 1998) ont plus que jamais recours au jump scare, notamment celui que l’on qualifiera de “fausse alerte” : un personnage en plan serré scrute les environs et, en se retournant, se retrouve nez à nez avec une connaissance, son/sa petit(e) ami(e), voire ses parents. La surprise est bien évidemment couplée avec une musique assourdissante, voire surmixée, pour que l’effet soit total. Le problème est que cette utilisation excessive va vite devenir aux yeux des critiques et du public une facilité bas de gamme, un cache-misère.
Dès lors qu’il est utilisé avec parcimonie dans un film à l’ambiance travaillée, le jump scare peut pourtant fonctionner à merveille. C’est le cas dans Les Autres (Alejandro Amenábar, 2001) avec la séquence où Grace – Kidman fait les cent pas dans le débarras avant d’avoir une grosse frayeur. Citons aussi [Rec] (Paco Plaza et Jaume Balagueró, 2007) dont la terrifiante séquence finale comporte un jump scare du plus bel effet. D’ailleurs le found-footage, très en vogue ces dernières années avec la saga Paranormal Activity, a souvent recours à cette technique. L’absence de musique et de montage associés à l’emploi d’une caméra subjective permettent de surprendre le spectateur autrement que dans un film traditionnel.
Récemment, James Wan, considéré comme le nouveau maître de l’horreur, a fichu la frousse à des millions de fans avec ses deux Conjuring. La mise en scène au service du suspense, agrémentée de jump scares millimétrés et diaboliquement efficaces, remporte sans mal l’adhésion du public. Néanmoins, le deuxième volet tombe un peu dans la facilité et la redite, exemple symptomatique d’un genre qui peine chaque année à se renouveler, ne fonctionnant que sur ses acquis confortables…
Les autres utilisations du Jump scare
- Le cinéma n’est pas le seul média à avoir recours à cette astuce pour terroriser les froussards que nous sommes. Les jeux vidéo type Resident Evil ou Silent Hill ont bien de quoi faire dresser les cheveux sur la tête. Tentez donc une partie de Slender Man pour tester vos limites en la matière, pas sûr que vous en sortiez indemne ! Et avec l’arrivée de l’Oculus Rift, casque à réalité virtuelle, l’expérience prend un nouveau tournant puisqu’il est désormais possible de jouer en immersion totale…
- Qui n’a pas été victime sur Internet des jeux type Maze ? Le principe est simple : diriger le curseur de sa souris dans un labyrinthe sans sortir du parcours, en trouver la sortie et accéder aux niveaux suivants. Mais ne croyez pas que vous allez battre des records… Très vite, alors que vous êtes bien concentrés, un hurlement retentit en même temps qu’apparait le visage de Regan, la gamine possédée de L’Exorciste ! À vous d’essayer : The Maze Game.
- Dans le même principe, Bongcheon-Dong Ghost est un webcomic coréen que les âmes sensibles devront à coup sûr éviter. Une note stipule d’ailleurs que sa lecture est déconseillée aux femmes enceintes, aux personnes âgées et à tous ceux qui souffrent de problèmes cardiaques… Vous n’êtes pas découragés ? Alors cliquez donc ici !
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Pour conclure ce dossier, êtes-vous prêts pour une ultime montée d’adrénaline ? La vidéo ci-dessous est une compilation de 40 jump scares alors éteignez les lumières, augmentez le volume, activez le plein écran et place aux sensations fortes !
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Par Sébastien Dm