Aux yeux d’un public non averti, comme des amateurs de phénomènes paranormaux, Amityville est l’un des plus célèbres cas de maisons hantées au monde. Partant d’un fait divers sordide, puis de l’emménagement de la famille Lutz, la « maison du diable » a défrayé la chronique et continue de partager les partisans de l’arnaque et ceux de la hantise avérée.
Pour le cinéma de genre, la fin des années 1970 a été marquée par L’Exorciste, véritable révolution dans le paysage cinématographique de l’époque. Or, si le présent film traite du diable également, son approche sera beaucoup plus psychologique, car moins explicite dans ses manifestations. Ici, il ne se sera pas question de possession à proprement parler, même si l’altération de la personnalité de George Lutz est perceptible. De même, l’ambiance insidieuse est comparable à la vision du mal tel que dépeinte dans La Malédiction. L’atmosphère anxiogène tient surtout au fait que le « démon » ne craint pas Dieu et encore moins ses représentants.
Rosenberg sait y faire dans l’horreur et arrive à installer une tension qui monte au fil des minutes. Quelques phénomènes étranges, quelques apparitions bien ciblées et voilà que le spectateur arrive à ressentir des sueurs froides. Il faut dire que le thème prête à ce genre de terreur. Stuart Rosenberg réussit pleinement à donner une âme à sa maison en lui donnant un style propre, une vraie aura que l’on doit d’abord à son aspect extérieur, avec ces célèbres fenêtres en quart de lune donnant l’impression que comme la colline, la maison a des yeux (à noter que la vraie maison d’Amityville, là où aurait dû se tourner le film avant que les autorités locales ne viennent mettre fin à ce projet, est effectivement dotée de telles fenêtres). La lumière orangée à travers ces fenêtres rend d’emblée la maison menaçante. L’intérieur est également soigné, Rosenberg et son chef opérateur ayant certainement porté une attention toute particulière aux zones d’ombres.
S’il reste un film d’épouvante de qualité à bien des égards, Amityville – La maison du diable a quelque peu perdu de sa superbe avec le temps. La faute à un scénario inconstant dont les faiblesses sont plus évidentes que par le passé. On regrette notamment cet atermoiement agaçant sur les différentes rumeurs colportées, et par conséquent retranscrites, sur l’affaire Amityville. Le traitement est volontairement lent et privilégie des manifestations paranormales progressives dans leur récurrence, chaotiques dans leur ordre d’importance. La qualité d’interprétation et l’ambiance oppressante qui touche au cadre domestique (et aux valeurs familiales) persistent néanmoins. Le film se révèle donc plus mystérieux que réaliste, et ce, en dépit de son point de vue subjectif d’une histoire vraie.