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J’ai rencontré le diable

Affiche du film "J'ai rencontré le diable"

© 2010 Softbank Ventures − Tous droits réservés.

I Saw The Devil, retitré chez nous J’ai Rencontré Le Diable, est l’un des gros cartons 2010 du cinéma coréen. Le film réalisé par le virtuose sous influences Ji-Woon Kim (2 Sœurs, A Bittersweet Life…)  était pourtant plutôt mal barré, cela en raison de quelques séquences jugées trop choquantes par le CSA local qui a bien failli lui coller un « interdit aux moins de 18 ans » complètement rédhibitoire pour toute projection en salles. Le film est finalement sorti après quelques coupes et a réussi à s’imposer comme l’un des très grands crus coréens de l’année dernière à découvrir le 6 juillet prochain sur nos écrans.

Kyung-Chul en pleine action

Dans ce revenge flick, Kyung-Chul (Choi Min-Sik), serial killer aussi menaçant que grotesque, fait l’erreur de massacrer la femme d’un agent secret de haut niveau, Kim Soo-Hyeon (Byung-hun Lee). Ivre de vengeance, ce dernier se lance dans une chasse à l’homme pour retrouver Kyung Chul. Une fois Kyung-Chul retrouvé et au lieu de le livrer à la justice, Soo-Hyeon se lance dans un jeu dangereux, relâchant dans la nature le tueur pour mieux le retrouver ensuite avec grand fracas et fractures diverses, l’objectif étant de le faire souffrir un maximum. La situation devient rapidement hors de contrôle, la police est dépassée par les événements et la peur et la douleur la plus extrême finiront par toucher l’un des deux protagonistes. Dans ce jeu pervers de chat et la souris, le diable du titre n’est peut-être pas celui qu’on croit.

Avec ses 2h20 au compteur, I Saw The Devil a le temps d’enchainer les moments de bravoures. Que ce soit la violente première confrontation sous une serre ou toute la séquence se déroulant dans l’antre d’un pote cannibale du serial killer, le réalisateur nous en met plein les rétines, multipliant les idées de réalisation – du genre traveling circulaire alors que Kyung-Chul massacre tous les passagers d’un taxi – sur une direction artistique souvent sublime et sur un montage quasi-parfait. Face à cette débauche de moments de bravoures, on pourra regretter une dernière demi-heure un peu vite emballée, une ficelle scénaristique servant de retournement de situation vraiment trop énorme ou bien une scène peu crédible de kidnapping en face d’un commissariat. De même, le scénario s’appesantit sur les attaques en début de film et néglige  un peu trop le dernier meurtre du tueur, véritable point de non-retour pour l’intrigue et déclencheur d’un climax final passant de l’intimiste au grand-guignol en une ouverture de porte. Dans la tradition du cinéma sud coréen, on pourra aussi apprécier le décalage entre un humour noir quasi-absurde et l’horreur des situations mises en scène.

Une victime – encore entière – du tueur

L’idée du film vient de Min-sik Choi et on comprend rapidement ce qui a poussé l’acteur ultra-physique de Old Boy à prendre en main le lancement de ce projet : le film lui permet d’incarner l’un des bad guys les plus marquants et inquiétants de ces dernières années, pas moins. Brouillant les pistes sur les origines de sa folie via quelques détails disséminés dans le film, le scénario malmène les sentiments du spectateur sur ce personnage tour à tour tortionnaire et torturé, inspirant peur, dégoût, voire un minimum de compassion, cela parfois au sein d’une même séquence. Dans le rôle de l’agent secret épris de vengeance, Byung-hun Lee est lui aussi parfait, cela surtout dans les scènes où son implacable détermination, véritable mécanique froide et explosive, laisse transparaitre doutes et fêlures.

Blessures et fractures n’empêcheront pas Kyung-Chul de traumatiser tout ce qui bouge

Et cette fameuse ultra-violence dans tout ça ? En version censurée comme non censurée le film est brutal et graphiquement très chargé. Le fait que les censeurs aient exigé la coupe d’une séquence de dîner à base de viande humaine – à l’écran cela donne un mec qui mange un steak bien saignant – remplacée dans la version censurée par une scène d’accouplement sauvage entre Mink-sik Choi et la copine de son hôte, pourra faire sourire tant les débordements sanglants et malsains sont nombreux dans le reste du métrage, certains gros-plans fixes faisant vraiment très mal et le tueur semblant avoir le viol comme seul raison de vivre.

I Saw The Devil ne déçoit donc pas nos attentes. Machiavélique à souhait et porté par quelques séquences assez dingues,  le film aurait quand même gagné à mener son histoire de manière un peu moins attendue et un peu plus resserré, manquant de peu sa place au rang des meilleurs thrillers sud-coréens occupé notamment par The Chaser. Aidé par deux comédiens au sommet de leur art, Ji-Woon Kim démontre encore son statut de réalisateur surdoué malgré une intrigue un peu déséquilibrée, dépassant sa réputation de bon « copieur » pour imprégner le film d’une personnalité artistique bien trempée.

J’ai rencontré le diable sortira en France le 6 juillet prochain.

Critique par Alex B


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