Le cinéma aime Stephen King et ça se voit.”La ligne verte” est une adaptation du roman du même nom : un film que l’on ne présente plus tellement il est gravé dans la mémoire collective. L’histoire est celle de John Coffey, accusé du meurtre et du viol de deux fillettes, qui arrive au bloc E, surnommé La Ligne verte, un endroit où sont détenus les condamnés à la chaise électrique. Sous ses airs de gros dur, il va pourtant changer la vie de ceux qu’il côtoie.
Frank Darabont est un fidèle de King, il a réalisé également “The Mist” et “Les Evadés” (autre film tout aussi génial et bien réalisé). Ce film est une leçon de cinéma à tout point de vue. Il adapte l’intrigue du livre mais il adapte aussi l’intrigue au genre cinématographique. Stephen King a vu beaucoup, vraiment beaucoup de ses ouvrages prendre vie sur grand écran et a vu également beaucoup de déception, des histoires adaptées trop librement, des réalisation peu soignées, des personnages bâclés bref, peu de ces adaptations ont su retenir notre attention mais ce film est probablement le meilleur de tous (Shining est trop éloigné du roman pour pouvoir prétendre à ce titre).
Très fidèle au livre, il prend pourtant quelques libertés mais celles-ci, au lieu de nuire au bon déroulé du film, apportent au contraire un vrai plus à l’histoire. Pourtant à sa sortie en 1999, une partie de la critique l’a descendu soulignant les longueurs, ainsi que le côté tire larme mais ce film est avant tout une sublime chronique humaniste qui mêle subtilement drame et surnaturel sans pour autant verser dans le film purement fantastique, le fantastique est là au service de l’intrigue plutôt qu’au centre du long métrage.
Tom Hanks, qu’on ne présente plus non plus, tiens là le rôle du chef du pénitencier, Paul Edgecomb, un homme bon qui sait voir le bien en chaque personne même si celle-ci ressemble à un ours. Il évolue dans un de ces rôles de prédilection et le joue avec brio. Mais le vrai premier rôle est celui de John Coffey (JC référence biblique parmi tant d’autres dans ce film), le détenu injustement accusé d’un crime qui est doté de pouvoirs étranges. Interprété par Michael Clarke Duncan, marquant dans la peau de ce colosse au coeur tendre, il incarne toute la bonté du monde en une seule personne, très bien écrit car il est en lui-même une contradiction, imposant par la taille mais extrêmement bienveillant. Tel est le message que le film
fait passer, et qui repose presque uniquement sur lui. L’acteur est tellement bon, qu’il a reçu une nomination à l’Oscar du meilleur second
rôle masculin.
Tous les autres rôles que ce soit celui de Brutal, Percy, la tête à claques de service, Jan, la femme de Paul, jouée par Bonnie Hunt (Jumanji, Rain Man) ou encore le directeur du pénitencier, James Cromwell (vu dans The Queen ou The Artist), tous sont incroyablement convaincants. Mais même si les interprétations sont incroyables, leurs écritures manquent un peu de subtilité : les gentils sont gentils et les méchants sont méchants, le combat entre le bien et le mal est un peu trop marqué, le message trop visible. En plus de cela, quelques anachronismes sont présents dans le film, par exemple à l’époque où se déroule le film, 1930, la chaise électrique n’est pas encore utilisée par la Louisiane.
Malgré tout, cela n’empêche à aucun moment l’histoire d’être cohérente avec elle-même. Le film dure plus de trois heures, et pourtant, le temps passe à toute vitesse. Cette fable profondément humaniste n’est pas sans défauts, mais elle fait partie de ces oeuvres qui nous marquent et qui nous font nous rappeler pourquoi on aime le cinéma.
Par Clément GAUGUE.