“Les enfants du Maïs” est une nouvelle de Stephen King d’abord publiée en 1976 dans le magazine Penthouse, puis en 1977 dans le recueil “Danse Macabre”. Il y décrit le périple de Burt et Vicky, un couple en crise qui échoue à Gatlin, petit patelin perdu dans le Nebraska , qui semble s’être arrêté de vivre 12 ans auparavant. La cause : les enfants y ont pris le pouvoir après qu’ils aient commencé à vénérer “Celui qui règne sur les Sillon” qui réclame le sacrifice de tout être qui dépasse les 19 ans.
L’adaptation du livre sort en 1984, elle est réalisée par Fritz Kiersch dont c’est le premier film. Le matériel de base étant très court, une vingtaine de pages, le contenu doit s’étoffer pour atteindre la durée de 1h30. King, qui a vu son scénario refusé par la production, ne porte pas le film “Les démons du Maïs” dans son cœur, pourtant, si certains aspects du film font tiquer, d’autres se révèlent très intéressants et ne dénaturent pas l’œuvre du maître de l’horreur.
Les principaux changements opérés concernent les personnages. Ce qui choque en premier lieu, c’est que les personnalités des protagonistes sont l’extrême opposé de celles décrite par King. Du couple au bord de l’explosion, hystérique et détestable, c’est ici un couple aimant, relativement calme face aux événements, qui dédramatise la situation avec quelques touches d’humour malvenu. C’est cependant avec les personnages de Isaac et de son bras droit Malachai que le film gagne des points. Présents à la toute fin de la nouvelle, très peu développés, les deux antagonistes voient leurs personnalités étoffées, installant une rivalité et un rapport de force qui aurait très bien eu leur place dans le matériel de base.
D’autres personnages sont aussi créés pour l’occasion, comme les frères et sœurs qui ne font pas partit du culte du Maïs, ( un gosse débrouillard et une fillette dotée d’un don de voyance inutile au récit). Le personnage du vieillard présente un peu plus d’intérêt : épargné pour faire dévier de leurs route les voyageurs trop proches de Gatlin, il est l’incarnation d’un passage de la nouvelle, dans lequel Burt s’interroge sur le fait que personne ne s’est rendu compte de ce qui se passe à Gatlin depuis 12 ans. C’est pas très fin et le vieux n’est là que pour une seul scène, assez mal écrite, mais cela a le mérite de rationaliser certains aspects assez illogiques de l’histoire ( une ville qui ne donne plus signe de vie, dans laquelle personne n’a mis les pieds ou n’a rien remarqué ? Sérieusement vous y croyez ?).
L’autre point qui différencie le film de la nouvelle, c’est la violence qui a été extrêmement adoucie. Si “Les démons du Maïs” est plein de promesses dans sa première partie ( l’introduction fait sont effet, et ce pauvre enfant qui fini sous les roues de la voiture du couple est très graphique), ce n’est malheureusement pas le cas par la suite. Le peu de scènes choc sont montrés hors champ, là où King décrivait des passages assez gratinés, dont le meurtre d’un enfant particulièrement sadique dans sa description. Outre le coté graphique, c’est dans cette deuxième partie que le métrage se perd, les scènes sont trop longues et la découverte de Gatlin est un véritable calvaire, il est vrai peu aidé par une mise en scène trop plate. Si les choses s’accélèrent par la suite, ce n’est pas pour le meilleur, Burt passe sont temps à courir, pendant que Vicky passe une grande partie du film suspendue sur une croix de Maïs, jusqu’à un final en totale roue libre, à base de discours moralisateur, d’enfant possédé, d’entité qui rampe sous le sol, d’ effets spéciaux optique foiré et d’ épis de Maïs qui se prennent pour les arbres de Evil Dead. Un peu indigeste.
Malgré ses défauts, “Les démons du Maïs” est une œuvre attachante, et en dépit d’une baisse de rythme en milieu de métrage, le début et le final sont accrocheurs. Les acteurs font le job, en particulier Courtney Gaines dans le rôle de Malachai et son sourire démoniaque, et John Franklin dans le rôle de Isaac, âgé de 25 ans au moment du tournage mais en paraissant 17 de moins physiquement à cause d’une maladie génétique. Lors de sa sortie,”Les démons du maïs” fut un succès, et donc logiquement, des suites ont été mises en chantier. En plus d’un téléfilm qui se veut plus proche de la nouvelle, c’est à ce jour pas moins de 9 suites qui ont été tournées. En vrac, on peut y trouver : du maïs dans la ville voisine de Gatlin, du maïs à Chicago, du maïs dans la cave d’un immeuble, du maïs qui s’en prend aux débutantes Charlize Theron, Naomie Watts et Eva Mendez, du maïs qui ressuscitera Isaac ( toujours interprété par John Franlin) et l’inévitable genèse du Maïs. On préférera à ces films de qualité variable l’hilarante parodie écrite par Trey Parker et Matt Stone pour un épisode de la série South Park.
Par Jonathan Roch