Une série de décès inexpliqués, un croquemort ultra-flippant, une bourgade américaine aussi désertique que ses mausolées semblent hantés et deux frères orphelins conduisant une superbe Plymouth Barracuda vintage… Non, il ne s’agit pas du pitch d’un épisode de “Supernatural” mais bien celui de « Phantasm », premier épisode d’une quadrilogie fantastique peu connue chez nous, cela malgré son prix spécial du jury d’Avoriaz en 79, et gardée jalousement par une cohorte de fans à l’adolescence marquée par l’image du Tall Man et la bizarrerie de ces longs métrages. Tu te demandais qui était ce Don Corascelli s’incrustant chez les Masters of Horrors alors que le nom de son meilleur film sonne comme un film de boule? Retour sur une œuvre atypique…
C’est le long d’un tournage étalé sur plus d’un an à la fin des années 70’s que fut mis en boite « Phantasm » par Don Corascelli et quelques camarades pour la plupart en quête de première expérience dans le cinéma. La petite équipe tournait alors pendant les week-ends et sur des lieux dénichés après avoir longuement sillonné les recoins de la Californie à la recherche de cimetières atypiques et vieilles morgues victoriennes. Un environnement qui se révélera en grande partie responsable de l’atmosphère du film, particulièrement lugubre et comme déconnectée de la réalité.
Pour l’histoire, le réalisateur/scénariste raconte avoir trouvé l’inspiration dans la perception américaine de la mort et le mystère entretenu autour des personnes travaillant dans les morgues, une forme de caste signalée tant par les habits typiques des croque-morts que par les rites associés aux funérailles. Ce thème s’est concrétisé avec l’histoire de Mike, un adolescent orphelin depuis peu et craignant d’être abandonné par son grand-frère, un guitariste professionnel partant régulièrement en tournée et interprété par l’un des frères Baldwin (Michael). Un jour qu’il le suit de loin à l’enterrement d’un de ses amis décédé, Mike surprend un étrange croque-mort soulevant à lui tout seul le lourd cercueil pour le ramener à la morgue. Intrigué, le jeune garçon décide d’enquêter sur cet étrange funérarium.
En partant de ce pitch de départ, Don Corascelli a pu profiter d’une absence relative de deadline pour ajouter des éléments au scénario pendant tout le temps de la production. Et si le Tall Man était aussi le boss d’une armée de nains encapuchonnés et particulièrement énervés ? Et si des boules de pétanques volantes munies de forets et perceuses allaient perforer le crâne des intrus ? Autant de proposition complètement bis qui viennent se réaliser ici pour des résultats souvent assez jouissifs. Ok, on aura un peu de mal à argumenter contre le ridicule d’une séquence comme celle voyant un doigt coupé se transformer en grosse mouche en plastique. Les deux acteurs essayent de rendre crédible la vivacité de la bestiole pour un résultat donnant à l’écran deux mecs en train de s’exciter autour d’un bout de plastoc inerte.
Conséquence de cet étoffage progressif du scénario: le déroulement du film manque parfois de cohérence, laissant l’impression d’un scénario finalisé au moment du montage. Certaines scènes sont ainsi bizarrement insérées dans la trame générale, une voix off tentant de faire le lien. Une impression confirmée par les déclarations de Don Corascelli qui avouera même avoir tourné cinq fins différentes pour le film en plus de posséder un stock significatif de séquences en rab. Des images qui seront d’ailleurs pour la plupart réutilisées dans le très psychédélique quatrième épisode de la série. Ce côté décousu, finalement loin d’être gênant, s’accorde bien avec l’ambiance onirique de cauchemar mi-éveillé d’un film où l’on s’attend toujours à voir l’un des protagonistes se réveiller.
Don Corascelli a eu aussi quelques vrais coups de bol. Un mauvais fonctionnement dans le mécanisme d’une boule volante plantée dans le crâne d’une victime et c’est un mini-geyser de sang qui en sort au lieu des quelques gerbes escomptés. Une défaillance technique pour une scène devenue culte par la suite. Pareil pour Angus Scrimm et son interprétation du Tall Man. Habillé par la mère du réalisateur, l’acteur est complètement habité par son rôle. Avec des mimiques et une gestuelles flippantes, quatre lignes de dialogues minimalistes – « Booooooy » – et une taille d’apparence gigantesque, le Tall Man s’incruste direct au panthéon des figures les plus charismatiques du bestiaire fantastique.
Le résultat final semble donc relever d’un véritable tour de magie. Malgré des acteurs tous assez mauvais, un montage souvent hasardeux, des effets-spéciaux parfois plus que limites, le comique involontaire en résultant n’entache jamais cette aura singulière, caractéristique de l’univers de « Phantasm », et qui arrive malgré tout à t’immerger suffisamment dans l’intrigue pour le bonheur de quelques frissons old-school bien plaisant. Il faudrait avoir été sevré au premier degré naturaliste pour ne pas apprécier ce trip filmique porté en plus par une musique complètement dingue, entre rock progressif seventies et rip-off du thème principal de « L’Exorciste ». If it doesn’t scare you, you’re already dead!
Par Alex B
pas mal mais sans plus . LES BOULES SPHERIQUES sont impressionants . note 5/10 -10 ans