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Poltergeist

Affiche du film "Poltergeist"

© 1982 SLM Production Group − Tous droits réservés.

En 1982, quand Tobe Hooper tourne Poltergeist, l’Amérique change. Les années Reagan inaugurent une nouvelle époque. Dès le début du film, on voit le père de la famille Freeling lisant tranquillement un magazine sur le lit conjugal avec le président récemment élu en couverture, pendant que sa femme lui prépare un joint. On sent bien que ce couple-là est différent, rescapé des années 70 : ils s’essaient au bonheur de l’American Way of Life, version banlieue californienne. Les premières images du film nous offrent d’ailleurs, avec un certain humour, une chronique sur la banalité presque ridicule de Cuesta Verde…

Les hommes regardent le football américain à la télévision, il y a des conflits de télécommande entre maisons, certaines changeant involontairement le programme des autres (un premier indice ?), les enfants font des farces et les adolescentes bien polies font des gestes obscènes aux ouvriers qui les sifflent pendant qu’ils creusent des piscines particulières. Le père est agent immobilier, la mère porte des shorts moulants en jean et les trois enfants et le chien semblent sortis d’une publicité pour « L’Amérique parfaite ». Sans oublier le pré-générique, représentant la fin des programmes à la télé, avec l’hymne américain en fond sonore.

Tout commence quand la famille, dont on fait doucement connaissance, semble endormie à moins qu’elle ne soit morte, le metteur en scène laisse planer un instant l’ambiguïté. Seul le chien va d’une pièce à l’autre. Dans les chambres, il ne parvient à réveiller que la benjamine, une adorable petite blonde : Carol Anne Freeling (Hether O’Rourke) qui descend seule les escaliers, s’installe devant l’écran de la télé, le regarde de manière hypnotique un long moment, avant de se mettre à lui parler. Ca y est, le cauchemar peut commencer.

Bien que réalisé par Tobe Hooper, auteur de Massacre à la tronçonneuse, ce film pourrait être considéré comme une œuvre de Steven Spielberg. Celui-ci a imaginé l’histoire originale, a co-écrit le scénario, a produit le film, était omniprésent sur le plateau de tournage et aurait même dirigé certaines scènes. Le succès du film engendrera deux suites : Poltergeist 2 en 1986, 4 ans après la sortie du premier opus et Poltergeist 3 en 1987.

Comme dans tout film d’horreur, les enjeux rencontrés par les héros sont symboliques. Les rapports de force au sein de la famille sont au centre des enjeux, notamment quand la mère n’arrive plus à communiquer avec sa fille “évaporée”, et que le père prend le relais, lui qui saura mieux y faire car “c’est lui qui donne les punitions” ! Et si le film est si intense dans ses scènes cauchemardesques, c’est parce qu’on ressent tout le désarroi de ces personnes devant faire face à l’inexplicable.

Poltergeist fonctionne parfaitement, car le mélange qu’il propose, aussi bien au niveau des émotions, que le style opposé des deux metteurs en scène, en font une œuvre unique et donc fascinante. On s’amuse à reconnaître quel artiste est derrière quelle scène (des spectres lumineux qui volent dans le salon ? C’est Spielberg ! Un type voit son visage partir en lambeaux dans un miroir ? C’est Hooper !). Mais Poltergeist est un film de fantômes avant tout : amusants au début, fascinants par la suite et carrément cauchemardesques sur la fin, les esprits frappeurs s’en donnent à cœur joie !

Film d’épouvante réussi au plus haut niveau, Poltergeist nous offre de vrais moments de frousse, dans la lignée des classiques de maison hantées. Rire, émerveillement, effroi, tension, compassion. On a rarement vu un film de fantômes aussi prenant !

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