La vie de Jess est bouleversée après l’accident de voiture dont sont victimes son mari Ryan et son beau-frère Roman. Plongés dans un profond coma, ils semblent avoir peu de chance de s’en sortir. Lorsque Roman se réveille, il prétend être le mari de Jess…
Aucun rapport avec le film éponyme de 1981 réalisé par Andrzej Zulawski, ni avec cet état bien spécifique de bouleversements physico-émotionnels particulièrement spectaculaires nécessitant l’intervention d’urgence d’un prêtre-exorciste du Vatican, d’ailleurs. Non, Possession n’est ni plus ni moins que le remake américain d’Addicted, drame sud-coréen réalisé par Park Young-hoon avec Lee Byung-hun dans le rôle principal (A Bittersweet Life, I Saw The Devil). Mettant en scène une Sarah Michelle Gellar (The Grudge 1 et 2, Southland Tales) au top de sa forme dans le genre qui lui convient le mieux et un Lee Pace (A Single Man, The Resident) au charme aussi ambigu qu’ensorceleur, Possession peut être considéré à juste titre comme un petit thriller dramatique sans prétention dont les interprétations très justes de ses acteurs principaux parviennent à compenser les quelques faiblesses scénaristiques qui le minent.
Malgré un packaging et un titre plutôt évocateurs, l’on pourra de prime abord être surpris de constater que Possession n’est en aucun cas un film d’horreur. La première partie du film est ainsi entièrement consacrée à l’établissement du lien très fort qui unit Jess (Sarah Michelle Gellar) à son mari Ryan (Michael Landes, vu dans Harcelés) afin de pousser à son maximum l’empathie du spectateur envers ce couple apparemment au comble du bonheur. Certains pourront d’ailleurs être vite exaspérés par l’aspect lisse et « trop parfait » de ces deux avatars par excellence de la comédie romantique Hollywoodienne dans toute sa splendeur : le mari en question écrit des lettres d’amour à sa bien-aimée chaque semaine, taille les roses du jardin pour les lui glisser dans son sac en catimini, passe des heures à sculpter son portrait… Oui, c’est pire encore que “le Monde de Candy”, je vous le concède. Cependant, au vu de la suite, on comprend plus ou moins les raisons qui ont poussé le film à s’attarder autant sur la relation exclusive de ces deux amoureux transis, bien qu’un tel étalage de guimauve aurait tout de même pu largement être évité. Mais bon, jusque là, cela reste plus que convenable, la candeur de la plus célèbre des chasseuses de vampires aidant plus que pas mal ; sans oublier bien sûr l’aura agréablement négative de Roman (Lee Pace), ex-taulard violent et frère de Ryan, qui parvient sans mal à modérer un peu cette idylle à la sauce « Charlotte-aux-Fraises » qui devient vite écœurante.
Possession construit donc paisiblement son château de carte rose-bonbon pour le détruire ensuite de manière bien abrupte (mais malheureusement fort prévisible), et le film prend alors une tournure fantastique plutôt intéressante bien que le traitement qui en soit fait demeure superficiel de bout en bout. En effet, on aurait aimé que certains aspects de l’étrange métamorphose de Roman à son réveil soient davantage creusés mais, vu la place énorme prise par le genre romantico-dramatique dans le film, il n’est pas surprenant qu’il ne reste que très peu de temps pour l’action ; ainsi les tenants et les aboutissants de l’intrigue principale sont-ils assez rapidement survolés et comptent à mon sens beaucoup trop sur la bonne compréhension du spectateur escompté excessivement patient et tolérant. Bref, tout cela est fort dommage, car en dépit de ce « traitement de surface » assez regrettable, Possession avançait de bonnes idées qui auraient pu changer la donne si elles avaient été un peu mieux exploitées.
Fort heureusement, et comme je le précisais en introduction, les deux protagonistes principaux s’en sortent plutôt bien : Sarah Michelle Gellar est assez convaincante en jeune veuve éplorée dont l’esprit littéralement dévasté par la perte de son époux se retrouve progressivement envahi par un doute aussi insidieux qu’intolérable ; tandis que Lee Pace demeure quant à lui tout à fait troublant dans son approche schizophrénique du personnage de Roman, dont l’attitude change brutalement du tout au tout. L’alchimie entre les deux fonctionne de fait remarquablement bien et l’on est vite charmé par l’étrangeté de cette situation somme toute assez intrigante car totalement inhabituelle. Malgré cette évidente bonne volonté de la part des acteurs, le dénouement final de Possession s’avère plutôt décevant et très vite expédié, ne restent au spectateur laissé sur sa faim que quelques légères incohérences à ronger.
En définitive, Possession est certes un film inégal au scénario un peu simpliste, dont le début croule sous les « pires » bons sentiments qui soient et qui est plus ralentissent considérablement l’amorçage de l’action mais, malgré tout, ce petit thriller comme il y en a des centaines dans la production cinématographique contemporaine contient ce petit « je-ne-sais-quoi » qui parvient à gommer une bonne partie de ses imperfections pour au final produire un honnête divertissement qui pourra vous faire passer un agréable moment comme vous rebuter au plus haut point.
Par Emmanuelle Ignacchiti