Présenté après la Masterclass de Robert Rodriguez au FEFFS, il est important de revenir sur la gènese de “Red 11” avant de l’aborder. En 1993, Robert Rodriguez présente son premier long, El Mariachi, qu’il boucle avec seulement 7000 dollars en guise de budget. Cet argent, il le gagne en faisant le cobaye pour un laboratoire de tests pharmaceutiques. La suite on la connait, de “Une nuit en enfer “au récent “Alitta, Battle Angel”, que l’on aime ou non ses films, Rodriguez est désormais une figure incontournable du paysage cinématographique. Le but premier de “Red 1″1, c’est de refaire un film avec 7000 dollars en poche dans les mêmes conditions que son premier essai, d’abord destiné à des fins pédagogiques pour montrer qu’il est possible de faire un film pour rien, financièrement parlant. Le film est d’ailleurs complémentaire avec son making of, qui décortique sur 2h30 tout le processus de création, dont nous avons pu voir 30 minutes. Une sacré leçon de cinéma qui montre qu’avec un peu d’astuce et de motivation tout est possible.
Red 11 c’est la couleur du t-shirt et le numéro donné à Rob, apprenti cinéaste qui doit 7000 dollars à la pègre. Pour réunir la somme, il se rend en clinique pour tester un traitement experimental, mais les choses issus de ces essais deviennent de plus en plus étranges et les effets secondaires ne sont peut être pas la seule et unique cause. Si ce résumé vous dit en partie quelque chose, c’est parce que Red 11 est un film semi autobiographique, Robert Rodriguez se sert de sa propre experience comme base scénaristique, et tout les personnages du films sont écrit sur des personnes qu’il a côtoyé durant son séjour en clinique, en les adaptant à sa sauce. On aura le mec marrant habitué des tests pharmaceutiques, le très bien nommé Score, qui compose en temps réel la B.O du film sur sa tablette ( on a d’ailleurs le droit à une superbe séquence qui détaille comment la musique d’un film est composée selon les images qu’elle doit accompagner), Knife, adapte du couteau, ou encore Spoiler, qui a la fâcheuse tendance à spoiler à tout va des films, mais aussi le film lui même.
Rodriguez en profite aussi pour exorciser ses démons, il nous a avoué avoir peur ,suite à son succès et à sa renommée, de s’endormir et de se réveiller 26 ans en arrière en clinique, en plein trip issu d’un effet secondaire du traitement qu’il testait. Le tout est tourné à la dérision dans sa première partie, l’humour est présent et est efficace ( la scène de la seringue dans l’oeil est à hurler de rire, les patients tout comme les docteurs sont bien écrit, leurs dialogues sont plein d’humour) . Dans la deuxième partie, place au délire avec d’un coté les héros qui developpe des super pouvoirs, et les autres qui se transforme en zombie vénère. La encore le coté horrifique, même si il est, et il faut le reconnaitre, à peine esquissé, fonctionne. Le tout est tourné à l’économie, donc. Rodriguez utilise tout ce qui traîne dans son studio, ce qui donne un coté méta qui peut parraitre à coté de la plaque, mais logique dans le soucie de faire des économies: on retrouve des accessoires de ses précédents films ( le marteau piqueur d’une nuit en enfer notamment), des extraits de tout ses métrages, certainement pour ne pas avoir à payer pour diffuser du contenu d’autrui, et même des restes de décors. Il emploie également ses deux fils Race Max et Rebel Rodriguez qui se partagent les postes de preneur de son, co-scénariste, compositeur de la bande originale et acteur. Les trucages sont d’une simplicité enfantine mais la réalisation et le montage font que tout passe parfaitement à l’image. Tout n’est pas parfait, la photographie est laide et à raison, Robert Rodriguez ne s’est servi que de deux projecteurs, qu’il bouge lui même entre deux plans, ce qui montre vite des limites. On se serait également passé de la voix off du héros qui décrit mot pour mot ce qu’il fait à l’écran.
En dépit du challenge de tourner un film avec un micro budget, “Red 11” est une belle réussite, de part son scénario superbement écrit et ses acteurs impeccables (hormis Rebel Rodriguez qui a tendance à un peu surjouer). Il fait également office de document précieux, qui prouve que réaliser un film est à la porté de tous, avec de la motivation, l’envie, un peu de débrouillardise…. et 7000 dollars.