Quand le petit malin de CUBE, NOTHING et CYPHER s’attaque au film de monstre, cela donne SPLICE : petit film fantastique sympa à regarder même si le dernier virage en fera décrocher certains.
Clive et Elsa (Adrien Brody et Sarah Polley) sont deux scientifiques jeunes et cools – traduction à l’écran: ils font la couv’ de WIRED et sont fans de design pour geek branché – qui combinent avec génie de l’ADN sur fond de heavy metal. Après avoir créé une paire d’hybrides à partir d’une variété d’ADN animal, le couple contourne les ordres de leur employeur pour fusionner le fruit de leurs recherches avec de l’ADN humain. L’expérience donne alors vie à un être hybride au rythme de croissance accéléré et bientôt nommé Dren. La créature devenue adulte étant plutôt sexy et nos deux génies de la génétique un peu plus perturbés que prévu, le triangle affectif va progressivement dériver…
On n’attendait pas vraiment Vincenzo Natali au commandes d’un film de genre au cadre bien défini et sans concept énorme comme accroche marketing. SPLICE prend en effet pour base l’un des postulats les plus usé à la corde du genre fantastique: l’homme de science puni pour avoir dépassé les limites morale/divines/humaines. A cela, le réalisateur ajoute une dose de complexe d’Oedipe et de réflexion sur la maternité. Sur ces derniers points, SPLICE n’est pas très subtile et l’écriture de l’un des personnages n’arrange pas les choses: Elsa démontre une psychologie de sociopathe justifiée bien lourdement par un background familial plutôt corsé et servie par la prestation d’une Sarah Polley à côté de la plaque, son personnage devenant trop rapidement borderline.
SPLICE se montre par contre un peu plus fin avec l’attraction insurmontable de ses personnages vers les limites de l’éthique et du tolérable. Clive et Elsa doutent mais se trouvent toujours des excuses pour poursuivre un petit peu plus leur expérience. Une fuite en avant vouée à la destruction : l’ultime hésitation du film se trouvera ainsi soldée de manière aussi brutale que funèbre.
La principale réussite de SPLICE réside dans Dren, la créature et ses différentes phases d’évolution. Le soin porté aux effets, aux maquillages ou au jeu de l’actrice la propulse directement dans le top des créatures les plus charismatiques du genre. Son physique étrange et ambigu amène le spectateur au niveau des interrogations des personnages du film. Clive et Elsa se perdent en effet dès les premières phases d’évolution du film à ne plus savoir comment l’appréhender. Le film pousse d’ailleurs bien loin la perversité des rapports dans le trio pour culminer dans deux scènes rarement vues sur grand écran hormis dans quelques mangas déviant.
Vincenzo Natali arrive à entourer son film d’un background scientifique à peu près crédible malgré quelques moments de verbiage scientifique assénés un peu inutilement et suivis de scènes qui, par contraste, sont forcément moins crédibles– du genre Clive a l’idée qui révolutionne la génétique en trois secondes et parce qu’il change de playlist pour une bande-son plus inspirante – et une introduction une peu longue. Une séquence, jouissive comme un bon bis des 80’s, sort de ce cadre aseptisé qu’est la techno-science pour pub l’Oréal et voit un show destiné aux médias tourner au désastre gore. Là, on se dit que c’est bon, les protagonistes se sont retirés dans une grange pouilleuse au milieu d’une forêt filmée comme un décor de la Hammer, c’est le signe que Natali après nous avoir exposé les attributs plutôt mortels de Dren, entre ailes rétractables et dard venimeux, va envoyer son lot de scènes d’attaques. Malheureusement il ne fait que l’esquisser…
Dans les séquences finales, le réalisateur/scénariste renie un peu son approche intimiste pour donner au spectateur ce qu’il est probablement venu voir : un film de monstre, genre qui n’apparaissait alors qu’au travers de courtes scènes jouant sur la potentielle dangerosité de la créature. Dans SPLICE, ce passage est beaucoup trop bref pour créer le minimum de tension nécessaire et ne pas lâcher le spectateur. Le premier climax achevant le triangle affectif était suffisant. En transformant trop radicalement Dren dans ses dix dernières minutes, SPLICE efface aussi tout l’affect ressentie pour la créature devenue un ersatz de Jeepers Creepers aux attaques confuses, tuant trois personnages en 30 secondes, sur une mise en scène exécutée à la va-vite pour cause de petit budget. Bref, le plaisir que l’on prend à voir ce SPLICE est quelque peu voilé par ce final en demi-teinte et s’achevant sur un twist de série B qui rappellera LA MOUCHE.
Par Alex. B.