Bien avant Parasite (2019), “The Host” a fortement contribué à la reconnaissance internationale d’un certain Bong Joon-Ho, réalisateur sud-Coréen qu’il n’est plus nécessaire de présenter. Ce film de monstre aquatique s’inscrit dans la lignée des films de Kaiju mais se démarque grâce à une finesse d’écriture dramatique exceptionnelle. Comme toujours, Bong Joon-Ho nous offre une œuvre d’une grande richesse : tant au niveau de la photographie, de la mise en scène, de la direction d’acteurs ou même du scénario.
Bien plus qu’un film de monstre, “The Host” vous plongera dans l’intimité d’une famille totalement dysfonctionnelle, aux relations complexes, à l’image d’une Corée déchirée. Véritable satire politique, Bong Joon-Ho utilise sa créature pour cacher une réalité bien plus monstrueuse. Le cœur du récit tourne autour de cette famille. On ressent la rugosité des liens familiaux à travers cette photographie terne, lourde aux tons sépias qui se marie parfaitement avec la morosité du scénario. Et pourtant, l’image est belle, travaillée et particulièrement riche. : le travail de la lumière évolue avec les personnages et ne dénote jamais avec les émotions explicitées.
Qui dit Bong Joon Ho, dit Song Kang-Ho. L’acteur, dont le faciès déchire l’écran, offre une performance nuancée remarquable. Bong Joon-Ho connait son acteur et sait le guider, la complexité de la relation avec sa fille est palpable et jamais surécrite. On peut penser que “The Host” est simplet, un film de monstre lambda comme tant d’autres. Mais le monstre n’est que l’arbre qui cache la forêt. Le film développe plusieurs pistes narratives dont aucune n’est bâclée ou laissée de côté. Mais dans cette richesse d’écriture se cache aussi des imperfections. Touchant et fort pour certains, lourd et manquant de divertissement pour d’autres. “The Host” ne se veut pas à la portée de tout le monde et n’est pas le film le plus accessible de la filmographie du réalisateur.
A l’instar de King Kong, le spectateur ne peut que s’attacher à ce monstre qui tente simplement de s’adapter dans un environnement qui lui est totalement hostile. La créature a été engendrée par l’homme mais rejetée de celui-ci car incomprise. Une sorte de Frankenstein réinventé où l’indifférence de l’homme aux conséquences de ses actes l’amène à déporter sa propre responsabilité sur un monstre. Qu’il soit palpable ou simplement sociétal. Une métaphore très forte de ce père vu comme monstrueux au début qui au fil du récit se révèle comme entièrement dévoué à sa fille. “The Host” bouscule l’image qu’on se fait du monstre et nous force à remettre nos conceptions en question.
Bong Joo-Ho tente de nous démontrer qu’un monstre n’est jamais ce qu’il semble être. Au final, qui le véritable “monstre” : la créature ? Les services sociaux coréens ? La politique en place ? Ou la culture de cette époque ?
Critique par Joanny Combey