Critique de We Are What We Are, remake dont le final aura choqué la vieille bourgeoise au dernier Festival de Deauville. Problème : elles ont probablement dû dormir pendant tout le reste du film…
Projeté dans le cadre de l’Etrange Festival 2013, We Are What We Are est l’adaptation américaine du film Ne Nous Jugez Pas du mexicain Jorge Michel Grau. On parle ici d’adaptation et non de simple remake puisque les scénaristes ont cette fois eu le bon goût de transposer le pitch original dans un autre contexte géographique pour pouvoir amener l’intrigue dans une toute autre direction. A ce titre, Jorge Michel Grau considère même que son histoire a été améliorée au passage.
Derrière la fenêtre : un monde extérieur aussi tentant que proscrit par les lois familiales
Plongé dans une campagne américaine délavée par les pluies et les inondations, le film s’ouvre sur le décès d’une mère de famille bien mal en point. Sa mort laisse derrière elle un paternel atteint de tremblote (Bill Sage), deux sœurs obligées de prendre les choses en main (lumineuses Ambyr Childers et Julia Garner) et un jeune garçon (Jack Gore). A la différence du film original, la particularité de la famille est cette fois présentée comme partie d’un culte hérité de temps plus anciens, avec sa Bible et un mystérieux “jour de l’agneau”. Une originalité permettant au film d’égratigner au passage tous les extrémismes religieux avec notamment cette autorité paternelle nimbée d’une spiritualité de pacotille.
Un prétendant qui va bientôt se prendre dans la tête cette fameuse “barrière de la religion”
Le film prend clairement le temps de poser son ambiance, ses personnages et les relations tissées entre eux, laissant mijoter la tension pendant près d’une heure avant de la laisser exploser dans un final aussi cathartique qu’inattendu (les réactions dans la salle pourront en attester). Ce virage radical dans le gore quasi-grotesque est étonnamment maîtrisé et reste complètement crédible. A l’opposé du rythme “un coup de flippe toutes les 15 minutes” du film d’horreur standard, We Are What We Are préfère donc une approche progressive qui rappellera le premier Morse.
Une direction intéressante qui aurait par contre gagné à bénéficier d’un scénario un poil plus étoffé pour nous maintenir en haleine. Une solution aurait pu être d’approfondir les personnages, de les faire vivre un peu plus… Malheureusement, les membres de la famille évoluent très peu en 1h40. Leurs caractères semblent déjà quasi-figés dans les premières minutes et ce n’est pas l’intrigue secondaire molle du genou et suivant l’enquête d’un médecin de campagne joué par Michael Parks qui va nous maintenir en éveil. A ce niveau, les péripéties et galères quasi-comiques rencontrées par la famille du film original manquent un peu…
Les joies d’un repas familial ambiance bougies cosy et viande d’origine contrôlée
We Are What We Are reste quand même un film vraiment bien emballé et Jim Mickle nous confirme son statut de réalisateur à suivre depuis son très remarqué Stake Land. La jolie photographie gris-pluvieuse et la BO tristounette nous plongent direct dans une ambiance aussi mélancolique que délétère et le casting est sans fausse note. En bonus, quelques saillies d’humour noir arrivent même à faire mouche dans ce climat dépressif… Mais même si les 20 dernières minutes rattrapent largement le coup, on aurait aimé que le reste soit moins soporifique.
Critique par Alex B
TRAILER :
BONUS : petit florilège des réactions outrées au Festival de Deauville 2013